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31/03/2008

L’inconscient d’Adolf

Il est bien solitaire ce « jeune homme d’aspect négligé » qui, ce 20 avril 1909, passe sa soirée d’anniversaire, sur un banc du Prater en compagnie d’un chien. Il se prénomme Adolf (Miguel-Angel Samiento). La vie est difficile à Vienne quand on est pauvre et qu’on voudrait être un artiste. La vie n’est pas gaie non plus pour Hugo von Klatz (Philippe Beheydt), ce jeune aristocrate, ami des artistes, qui hait son père et qu’on adresse au Docteur Freud (Jean-Luc Paliès) pour qu’il le psychanalyse.

Vienne 1913, la pièce d’Alain Didier-Weil multiplie les lieux, fait se croiser de nombreux personnages et se déroule sur cinq ans, longue période d’incubation qui transforme l’artiste raté en antisémite nationaliste et haineux. Georg Tabori avait conçu une farce tragique, Mein Kampf sur un sujet semblable. Alain Didier-Weil s’intéresse à la dimension psychanalytique. Comment un homme bascule-t-il dans la haine ? Comment, un autre s’en guérit-il ? L’inconscient d’Adolf était-il déterminé par les mythes germaniques ? Celui d’Hugo ressemblait-il à celui de Sophocle ?

Il faut de la subtilité pour rendre intelligible un tel texte. Et Jean-Luc Paliès a su trouver toutes les astuces. Il en conçoit la mise en scène en forme d’oratorio. Vêtus de noir, queue de pie pour les hommes, robes pour les femmes, les comédiens entrent comme les musiciens d’un orchestre qui s’installent à leur pupitre. Ils vocalisent en douceur comme on accorde les instruments. Au fond, à jardin, une musicienne produit d’étranges sonorités sur des instruments de verre. Deux comédiennes, Magali Paliès et Stéphanie Boré chantent des airs allemands, elle jouent aussi. Pas de réalisme, tout se donne en métonymies. Une tunique cramoisie bordée d’or devient un tableau de Klimt, un banc peut figurer le divan de Freud, le canapé d’un salon, le pupitre se faire ostensoir, le brigadier bâton de commandement. Les comédiens (Pascal Parsat, Alain Guillo, Katia Dimitrova, Isabelle Starkier, Jean-Pierre Hutinet, Bagheera Poulin) changent d’identité, dans une cérémonie bien réglée qui fait passer sans hésitation des allées du Prater aux salons viennois, de la rue aux demeures, du cabinet de Freud à l’asile de nuit, avec pour seul décor ces pendeloques de verre noires et blanches, ces estrades sombres, et ces fameux pupitres, véritables signatures de Jean-Luc Paliès.

Il faut aimer le Théâtre pour programmer Vienne 1913, un texte dense qui mêle Philosophie et Histoire, Sociologie et Psychanalyse. Pierre Soller, à la Maline combat vaillamment pour faire connaître le théâtre contemporain et choisit toujours la qualité dans les spectacles qu’il invite.







Vienne 1913 d'Alain Didier-Weill
C’était vendredi 28 mars.
à La Maline
La Couarde-sur-Mer

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