16/03/2011
Paulette et la solidarité
Aujourd'hui, je vous donne le texte n° 1...
Paulette et la solidarité
Personnages :
Paulette : la cinquantaine, ne se laisse jamais abattre.
Ginette : plus âgée.
Paulette entre dans le bistrot un sourire sur les lèvres. Elle aperçoit Ginette déjà attablée devant un verre de vin blanc.
Paulette – Toi aussi Ginette, tu commences à prendre goût au petit blanc sec du patron.
Elle s’assoit et fait signe au garçon.
Ginette – Tu as l’air toute guillerette aujourd’hui.
Paulette – Ouais ! Je vais être seule pendant 3 semaines. J’vais en profiter pour repeindre la chambre de mon fils.
Ginette – Tu vas faire ça toute seule ?
Paulette – Ben oui ? J’ai pas Valérie Damidot sous la main. Mon fils a même choisi la couleur des murs.
Ginette – Ah oui ! Laquelle ?
Paulette – Jaune ! Mais un beau jaune soleil. Il en a marre de la couleur bleue. Faut plus lui en parler du bleu, ça lui rappelle trop de mauvais souvenirs. D’ailleurs, il n’est pas le seul.
Ginette – Je ne comprends pas, quel genre de souvenir ?
Paulette – Bien sûr, ça ne te dit rien à toi, quand je dis bleu ; toi et le foot …Je t’explique ; nos footballeurs ont joué en franc-tireur laissant leur esprit de groupe de côté. Ils n’ont pas été très accueillants avec leurs fans. D’ailleurs, comme me dit mon fils, ils ont manqué de solidarité. Ce mot a dû être rayé de leur vocabulaire, aux bleus.
Ginette – Il part où ton fils, pendant ces trois semaines ?
Paulette : Y part en Angleterre pour améliorer son anglais.
Ginette – Wouaouh ! À lui les petites anglaises ?
Paulette – Oh ! Attends ! Il n’a que 17 ans, il est encore mineur, alors pas de folie avec son corps. Mais, j’ai quand même mis dans sa valise des … tu vois ce que je veux dire.
Ginette hoche la tête avec un air entendu.
Ginette - Il va pouvoir leur apprendre notre belle langue française. Par contre, pour l’autre appétit, je ne sais pas si ça va fonctionner, vu ce que mangent les Anglais. Ce ne sera pas des agapes.
Paulette – Agathe ? Non il ne part pas avec Agathe, puisqu’il part tout seul.
Ginette - hausse les épaules et lève les yeux vers le plafond avec un léger soupir d’agacement. Je te parle d’A G A P E. Festin ! si tu préfères. D’ailleurs, je ne connais pas Agathe !
Paulette - Mais si, la petite rouquine qu’aime bien mon fils. Elle aussi d’ailleurs, elle aime bien mon fils. Ils sont très complices. J’la trouve marrante. Quand elle parle, elle zozote à cause de son cheveu sur la langue. Comme me dit mon fils, elle a de la chance car c’est pratique pour prononcer l’anglais, surtout les the.
Ginette – Cela va te coûter cher, l’Angleterre c’est pas donné.
Paulette - Non, c’est un échange solidaire entre la France et l’Angleterre. Comme mon fils est dans les trois premiers à l’école, il a donc droit à un séjour tous frais payés en Angleterre.Et pour que cet échange se fasse harmonieusement, je recevrai à la fin de cette année un petit anglais de Pullover.
Ginette – Pull Over ? ça se trouve où en Angleterre ? C’est quoi ? Un village.
Paulette – Non ? Il paraît que c’est un port. J’ te dirai sur une île, les villes sont toutes des ports.
Ginette – Pull Over ? T’es sûre du nom ?
Paulette – Ben… Oui, la ville où les Beatles ont chanté dans une cave.
Ginette – Aaaah ! LIVERPOOL ! Paulette ! Toi et la géographie !
Paulette – Bon ! J’en étais pas bien loin ! Ce sont les mots : l’hiver et pull qui m’ont un peu embrouillée. Je suis française !
Ginette - J’espère qu’il rencontrera des Anglais accueillants.
Paulette - Ne t’en fais pas, ce sont les parents du p’tit Anglais que je recevrai à Noël.
Ginette – Ah bon ! Il les connaît déjà ?
Paulette – Oui, grâce à Internet. Tu connais mon fils. Toujours à réseauter sur sa toile. Ça crée des liens, comme il dit. Son site s’appelle FESSEBOUC. Drôle de nom ! Pourquoi pas CULDECOCHON ? Il m’a montré la page de son copain où il y a plein de photos, et surtout celle de son grand-père entouré de tous ces anciens compagnons alpinistes en costume d’époque. Ils ont, paraît-il, grimpé tous ensemble attachés par une corde, la plus grande montagne du monde. D’ailleurs, c’était lui le premier de cordée.
Une grande amitié s’est installée entre ces deux gamins. Mon fils me dit qu’il va enfin voir ce grand alpiniste pour de vrai, car son grand père est toujours vivant. C’est fou ce que tu peux rencontrer de célébrités grâce à Internet.
Mais parfois tout cela me fait peur. Tu te rends compte, s’ils leur prenaient l’idée de débarquer tous en chœur à la maison ? Ma petite maison n’a que trois pièces.
Ginette – Mais non ! Tout cela reste des rencontres virtuelles. (Un silence) T’as vu tous ces jeunes qui se lancent des invitations sur Internet et qui se retrouvent tous à boire un coup sur une place d’une ville quelconque ? Avec de tels agissements, c’est la mort du bistrotier… Surtout qu’ils débarquent tous avec leur bouteille.
Paulette – Ouais ! Avec Internet, ce serait même la mort du téléphone et bientôt la disparition du facteur. T’as plus besoin de passer ton coup de fil à tes amis pour les inviter, t’allumes ton ordi, tu cliques et c’est fait.
Paulette et Ginette - On n'arrête pas le progrès !
13:53 Publié dans Concours, Culture, Langue, Théâtre | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : théâtre, srmaine de la langue française, thélième