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28/03/2010

Concours 2010 (3)

Cette année, vous pouvez voter aussi par mail.

Vous allez pouvoir lire les dix textes sélectionnés, et vous pourrez donner votre note et un commentaire, par mail, sur

thelieme@gmail.com

Texte n°3

 

 

  

Ballade de Philibert le Beau

 

 

L’Eglise de Brou, manifeste du style gothique flamboyant… La fuite du soleil ferme les lourdes portes de l’église sur les derniers visiteurs. Un murmure à peine audible s’élève du tombeau de Philibert Le Beau, Duc de Savoie, faisant écho au gisant de Marguerite de Bourbon, sa mère.

 

 

Marguerite

Oh ! mon fils, ma chair

Mon bon Philibert

Quel est donc le motif

Qui précipita ta fuite ?

Car dans tout le pays,

On chante cette complainte bien haut

Que devant un cheval de Troie

Partit Philibert Le Beau. 

 

Philibert

Ma tendre mère, ma douce amie

Il me fallait fuir mon mentor devenu ennemi

Du bal t’en souviens-tu ?

Ce vieux menteur,

Ce beau parleur,

Ce baladeur,

Mains ravisseuses,

Vola à ma tendre mie

Son cœur 

 

Marguerite

Alors te voila parti,

Par les monts et par les vaux,

Cahin-caha, toujours plus haut,

Va crescendo,

Fuyant les galères, fuyant les cachots,

Du vieux château

Tu peux chasser René,

Sans dire un mot,

Tu as un mobile Philibert Le Beau. 

 

Philibert :

Ne plus trembler, ne plus m’emporter,

Ne plus m’escagasser,

Faire le vide en moi, ,

Faire le ménage dans mes méninges,

Faire taire le remue-méninges,

Le rallier à ma cause,

le convaincre et s’il l’ose,

Changer mon épine en rose.

Zapper ma douleur,

En mille couleurs,

Toute médecine bonne pour apaiser mon cœur,

Mixer la potion, choisir les ingrédients,

La belladone, la jusquiame, le safran,

Ou l’aconit ou même sa variante,

Et redonner courage à mon âme vaillante. 
 
 
 
 
 
 

 

27/03/2010

Concours 2010 (2)

 

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Texte N°2

 

 

                                        

L'imparfait du présent

 

 

Cours des Dames, dans le vieux port de la Rochelle.

Un clochard endormi sur un banc, est brusquement réveillé par un personnage d'une pâleur extrême. L’homme, est vêtu d'une longue veste bleue, d'un pantalon moulant rouge s'arrêtant à mi-mollet, de bas blancs il est coiffé d’un tricorne, et chaussé de chaussures à boucles.

 

Fantôme  -   Bonjour mon cher ; avez-vous bien dormi ?

 

Le clochard se redresse en baillant, cheveux hirsutes et vêtements défraîchis. Il lisse du plat de sa   main une veste usagée en fixant l'inconnu qui se tient à quelques pas de lui.

 

Le clochard - Comme un prince dans un lit à baldaquin. Ce banc a des vertus insoupçonnées. (Puis il jette un coup d'œil  suspicieux à son visiteur.) Mais dis donc ! Qui es-tu toi ?

 

Fantôme   -  Philippe de la Bonnetière, Corsaire du Roi.

 

Le clochard  -  Et moi, je suis le Roi d'Angleterre. Je te préviens, si c'est une blague, je ne suis pas d'humeur à plaisanter.

 

Philippe prend un air offusqué:

 

Philippe   Mais je ne plaisante pas ! Je suis né au XVIe...

 

Le clochard lui coupe la parole :

 

Le clochard -   Et moi, dans le xxe

  

Philippe  d'un air moqueur -  Mais nigaud, je ne parle pas de quartier de Paris, mais de siècle !...

 

Le clochard  -  Pas de quartier ! Ça Monsieur, c'est pour l'abordage... (Il marque un temps d'arrêt puis s'exclame)  Alors comme ça, tu serais un fantôme !

 

Philippe   - En chair et en os. Un peu plus os que chair mais qu'importe ! Un corsaire ne s'avoue jamais vaincu.

 

 Le clochard  -  Ça alors ! Je n'arrive pas à y croire.

 

Philippe -    C'est pourtant la vérité.

  

 Le clochard  -   Ma parole ! Je rêve... Tu ne serais pas en train de me monter une galère par hasard ? Parce-que je n'aime pas qu'on se paye ma tête.

 

Philippe -   Vous avez peut-être l'air endormi mais ce n'est pas un rêve.

 

Le clochard impatient -  Dis donc ! J'aimerais que tu me lâches avec tes grands airs. Des vous par-ci, des vous par-là, appelle-moi Jo et dis-moi plutôt ce qui t'amène ici.

 

 

Philippe -   Une dernière mission qui me permettra de reposer en paix. Te protèger des effets néfastes de l'alcool. Ça Vous... heu... ça  t'étonnes ?

 

Le clochard hausse les épaules.

 

Le clochard -  Oh ! Plus rien ne m'étonne dans ce bas monde, pas même ton accoutrement. Comme quoi... (En disant cela, il essaye d'attraper la bouteille) . Je t'offre un coup de rouge ?

 

Philippe    - Désolé, je ne bois que de grands crus.

 

Le clochard -   Et moi, je ne prends que de grandes cuites. Passe-moi la bouteille...

 

A la grande surprise du clochard, le fantôme saisit la bouteille.

 

Philippe -    Je préfère te mettre en garde. Le vin te rend agressif. Arrête de boire. Tu te réfugies dans un vice qui va  crescendo et qui, comme le cheval de Troie, te détruira.

 

Le clochard de plus en plus agacé gesticule sur son banc.

 

Le clochard -    Tu commences à m'escagasser avec ta morale ! Si j'ai besoin d'un mentor, je te le ferais savoir.

 

Le fantôme s'avance vers lui.

 

Philippe - Je ne voulais pas te vexer. Désolé que tu le prennes sur ce ton.

 

Le clochard donne un coup de pied dans une bouteille vide.

 

Le clochard -    Change de ton (thon) et parle-moi plutôt de sardines... ou de bars... J'en suis un des piliers. (Puis il sort un restant de sandwich de sa poche qu'il s'apprête à croquer.)  Tiens ! Passe-moi le journal.

 

Le fantôme regarde autour de lui mais ne semble pas voir de journal.

 

Philippe  -   Quel journal ?

 

Le clochard -   Celui qui est par terre. T'en vois d'autres ?

 

Le fantôme ramasse le journal du bout des doigts et lui tend d'un air dégouté.

 

Philippe - Mais tu n'as pas honte de lire ce torchon qui traîne là depuis plusieurs jours ?

 

Le clochard -  De quoi je me mêle ! De toute façon, ça fait parti de mon quotidien. Je lis la page des sports et je zappe le reste, c'est un vrai remue-méninges. Qu'est-ce que tu en dis ?

 

Philippe  -  J'en dis que tu n'es pas sérieux et que tu ferais mieux de te rendre utile.

 

Le clochard n'est pas de cet avis. Il montre la bouteille du doigt.

 

Le clochard -    Si c'est tout ce que tu as à me proposer, je préfère la bouteille. (Il tend le bras pour l'attraper mais le fantôme l'en empêche.)

 

Philippe -    Pas question ! Je ne veux pas que tu finisses, comme moi, noyé dans les eaux troubles du port. En temps que corsaire, j'ai une mission à remplir et je la remplirai.

 

Le clochard -   Remplis plutôt mon quart ; on parle, on parle... j'ai la bouche qui se dessèche. (Joignant le geste à la parole, le clochard fait mine de remplir un gobelet en métal d'une propreté douteuse. Le fantôme secoue la tête.)

 

Philippe -   Oublie ça vieux si tu ne veux pas avoir ton nom dans la rubrique des chiens écrasés.

 

Le clochard lève les bras au ciel.

 

 Le clochard -   Tu oses me traiter de vieux ! À ton âge ! Raconte- moi plutôt comment t'as fait pour en arriver là ?

 

Le fantôme soupire en laissant retomber ses bras d'un geste fataliste.

 

Philippe - C'est une longue histoire. Surpris en état d'ébriété, c'est sous l'emprise de l'alcool que j'ai été arrêté à la Rochelle par les soldats du roi, emprisonné dans la tour de la Lanterne et balancé dans le port sans pouvoir me défendre.

 

Le clochard pousse un sifflement admiratif.

 

Le clochard -    Rien que ça ! Ben dis donc ! Et pour quel mobile ?

 

Philippe -   Pour avoir tenté de m'évader de cet endroit sinistre. En prison, la vie est monotone et j'aime les variantes.

 

Le clochard se lève et lui donne une bourrade dans le dos.

 

 

Le clochard -  Ça ne t'a pas réussi...

 

Philippe -     Parce que tu crois que mendiant, c'est une réussite ?

 

Le clochard se rassoit.

 

Le clochard -    Et comment ! Je ne suis pas comme vous un prince du Palais-Royal. Je suis un ancien de la Royale, moi Monsieur, honnête citoyen qui a viré flibustier. J'habite Hôtel des Courants d'air et je dors à la Grande Ourse. Ma couverture, c'est le ciel...

 

Le fantôme pointe son doigt vers le firmament.

 

 

Philippe -       J'en connais qui l'ont pris sur la tête...

 

 

Le clochard -   Moi aussi mais ils ne sont plus là pour en parler. A ce propos, des policiers sont venus m'interroger hier soir sur la femme qui a disparu. Celle qui faisait du jogging en écoutant son baladeur. Tu ne l'aurais pas croisé dans les abysses, par hasard ?

 

Le fantôme jette un regard vers l'eau avant de répondre :

 

 

Philippe - Non, pourquoi ? Il y a du nouveau ?

 

Le clochard -  Oui, j'ai retrouvé son baladeur. Tu vois que je peux être utile...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  

 

 

 

 

 

 

 

 

concours 2010 (1)

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texte n°1

Brèves de bistrot

 

Paulette entre dans le bistrot de Roger.

 

Le patron - Salut Paulette, ce sera comme d’habitude ? (Il remplit le verre qu’il a placé devant Paulette) Dis-donc t’en as une mauvaise mine !

 

Paulette - Je n’ai pas fermé l’œil de la nuit.

 

Le patron - J’espère que ce n’est pas ta cirrhose qui t’empêche de dormir ?

 

Paulette  - Non, elle, elle va bien, tant que je l’entretiens avec ton p’tit blanc sec, elle me fiche la paix.

 

Le patron - Ben quoi alors, on dirait que t’as passé la nuit à compter des moutons mais qu’il y en avait tellement que cela t’a pris jusqu’au matin.

 

Paulette - C’est mon fils, hier c’était son anniversaire et il a reçu des copains.

Alors, je les ai installés dans le garage, car tu connais les jeunes, ils aiment faire du bruit.

Mais là, ce n’était plus du bruit, mais un vrai boucan et ça a duré jusqu’au petit matin. Heureusement que les voisins étaient en va­cances.

Tant qu’ils jouaient de la batterie cela pouvait aller, mais dès que mon fils s’est mis à faire miauler sa guitare électrique et à chanter avec sa voix de fausset, j’ai cru que la SPA allait débarquer, tellement que le son allait crescendo.

 

Le patron  - Moi aussi, quand j’étais gamin, avec les copains on a monté un orchestre, mais c’était plus accordéon et valse musette. Maintenant, les jeunes ne savent plus guincher, ils préfèrent casser les oreilles des voisins.

 

Paulette  - Ouais ! T’as raison. Je suis donc allée les voir toute escagassée et leur ai demandé de jouer en sourdine.

Ils m’ont répondu que le rock n’ roll se jouait à fond la caisse.

Alors, timidement, je leur ai suggéré de jouer sans la caisse, à des jeux intellectuels, (comme Jacques a dit par exemple). Mon fils m’a répondu qu’il n’aimait pas les remue-méninges.

 

Le patron - Ouais ! En fait de méninges, les pauvres, elles sont au supplice à l’heure actuelle, avec tout ce que les jeunes se collent dans les oreilles, genre baladeur, casques audio et autres M.P.3., montés à fond.

Ça doit s’entrechoquer dans la boîte crânienne. Passés 30 ans, ce n’est plus des écouteurs qu’ils devront s’enfiler dans leurs oreilles, mais des sonotones.

 

Paulette  - Je n’aimerai pas être un neurone dans la tête de mon fils, quelle ga­lère, car le pauvre en plus de ramer il doit se farcir des tempêtes sonores.

 

Le patron hochant la tête- Ouais ! On n’arrête pas le progrès ! Mais est-ce un progrès de deve­nir esclave de cette technologie. Hier, j’ai demandé à un jeune d’éteindre son mobile car il nous a cassé les tympans en hurlant des grossièretés à son correspondant.

Maintenant avec ces téléphones, t’es au courant de toute leur vie, les gens ne se gênent plus.  Parfois, j’aimerais avoir une télécommande pour les zapper.

Il rit : j’ leur couperais le sifflet en pleine  conversation. T’aurais plus le son, mais il te resterait l’image d’un type qui gesticulerait devant son portable.

 

Paulette - Tiens !  En parlant de portable, j’ai vu une affiche dans le métro qui parlait d’une exposition de mobiles. Tu ne devineras jamais où.

 

Le patron - Dans le métro ?

 

Paulette - Non ! Le vendeur a dû juger l’endroit trop petit. Dans un musée !

 

Le patron - Dans un musée ? J’vois pas à quoi ça sert ! Tu entres dans un magasin de téléphones portables et là, t’as l’embarras du choix. Y en a plein les murs de la boutique.

 

Paulette - Ouais ! Mais ça devait pas lui suffire, alors il a choisi plus grand. Quand j’ai lu le nom du marchand, je me suis dit, encore un nouveau sur le marché ;  ça s’appelle « les mobiles CALDER. »

 

Le patron – Calder ? Je savais pas qu’il faisait aussi des portables ! Les marchands de téléphones feraient n’importe quoi pour rameuter des clients. Bientôt tout le monde aura son  portable. J’ai même entendu dire que dans les maternelles les enfants en ont.

 

Paulette haussant les épaules - Portables et couches culotte tu crois que ça fait bon ménage, surtout qu’il  n’y a pas de poche pour les ranger.

 

Le patron hochant la tête d’un air grave - Des millions de téléphones portables collés sur les murs d’un musée. Pour moi, c’est presque de l’art.

 

Paulette - Ouais ! Mais de l’art moderne. Ils ont intérêt à les éteindre, car tu t’imagines s’ils sonnent tous ensemble ! Quelle cacophonie ! Je préfèrerai entendre chanter mon fils, au moins lui, je peux le faire taire.

 

Le patron  resservant du vin blanc à Paulette– Tiens, c’est bon pour la santé ! Au fait, tu t’es fait vacciner contre la grippe A ?

 

Paulette  - Non. D’ailleurs je ne suis pas la seule. Tu te rends compte le nombre de vaccins que l’Etat a achetés et  qui leur reste sur les bras.

Le mois de janvier a été pour le gouvernement la période des soldes, car pour les vaccins ça a été la grande braderie.

 

Le patron - Ouais ! Je crois même qu’il en a refilé à des pays qui n’ont jamais connu la grippe. Cette grippe A est tout de même bizarre, Il y a des gens qui l’ont et qui ne le savent même pas.

 

Paulette - Ouais ! Elle n’est pas restée longtemps en France. Quelle identité avait-elle ? Pas française en tous cas, puisqu’elle est née au Mexique.

Cette grippe A a envahi la France d’une manière sournoise ; elle me fait penser à une variante du cheval de Troie.

Quand j’en ai parlé à mon fils, il m’a regardé d’un drôle d’air ; il m’a expliqué qu’un cheval de Troie était un virus qui envahissait les sys­tèmes informatiques. Sa réflexion m’a fait rire, grippe égal virus, dans un sens, il n’avait pas tort.

 

Le patron – Au fait, pour son anniversaire, tu lui as offert quoi à ton fils?

 

Paulette  - J’lui ai donné des sous, tu connais les jeunes maintenant, on sait plus quoi leur acheter.

Tiens ! Son vieux copain à mon fils, Freddy, celui qui lui sert de men­tor, est venu à la fête. Il lui a offert un appareil minuscule qui enre­gistre toutes les musiques qu’il veut. Cet appareil ne doit peser que quelques grammes.

Je n’ai toujours pas compris comment ils font pour entrer autant de musique dans un si petit appareil. C’est vrai, quand j’étais plus jeune j’avais un baladeur qui fonctionnait avec des K7.

 

Le patron - Tu veux parler du M.P.3.  Il y en a qui sont aussi petits qu’un timbre poste. Bientôt, t’auras plus besoin de mettre ta musique dans ta poche, une dent creuse suffira et tu  seras transformé en jukebox.

On n’arrête pas le progrès !